LE MONDE INVISIBLE
Je suis un oiseau bleu, je vole, invisible. Et j’habite un monde
invisible lui aussi. Qui le peuple ? Deux anges jumeaux, l’un rose,
l’autre vert, leurs ailes duveteuses nous frôlent avec la douceur d’un
pétale de coquelicot ; ils jouent à être des skieurs et glissent sur
un nuage. Leur allure effrénée effarouche la libellule qui se réfugie
auprès de la rassurante Ophélie, une fée de conte échappée d’un livre
un jour qu’il était resté ouvert par inadvertance.
Une hirondelle vit avec nous. Un soir d’orage, comme le tonnerre crevait les nuages, elle est montée si haut qu’elle nous a rejoints dans sa trajectoire. Elle pépie parfois avec le fantôme qui depuis des siècles cherche qui il est . Peut-être fils de radjah ? Il a un diamant sur le front qui nous éclaire quand la nuit tombe.
Voici mon grand ami, l’accent circonflexe, toujours prêt à chapeauter quiconque. Un voltigeur aux longues jambes nous est arrivé par hasard. Un bond gigantesque l’a assis auprès du Pierrot lunaire qui justement prenait le frais au bord du ciel.
Le voltigeur tenait contre son cœur la souris blanche, un peu effrayée mais si vite apprivoisée qu’elle est devenue notre mascotte. Elle flirte parfois avec le papillon bleu étoilé de jaune safran. Ils se parlent un langage connu d’eux seuls.
Vous ne connaissiez pas le monde invisible ? Il suffit de fermer les yeux.
LORRAINE