Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
LE CAHIER DU SOIR de LORRAINE
LE CAHIER DU SOIR de LORRAINE
Publicité
LE CAHIER DU SOIR de LORRAINE
Visiteurs
Depuis la création 178 214
Newsletter
48 abonnés
Derniers commentaires
Archives
29 décembre 2011

LA PREMIERE DANSE

 

     Quand on a des frères et sœurs beaucoup plus âgés,  il arrive qu’on se trouve dans des circonstances inattendues, qui mettent terriblement mal à l’aise.

     Or donc, ce soir-là, nous allions au bal. Nous, c’est-à-dire ma sœur et son mari, mes deux frères et maman. C’était un « Bal de société »  j’avais quatorze ans et une tenue tout à fait tangoappropriée : la robe de demoiselle d’honneur  portée le printemps précédent au mariage d’un cousin, identique aux trois autres demoiselles d’honneur qui complétaient le cortège. J’avais aussi enfilé les souliers blancs assortis à la toilette en soie brochée et je me sentais affreusement mal à l’aise.  J’aurais voulu mettre mon petit deux-pièces bleu-roy du dimanche, qui ferait moins ostentatoire. Car je brûlais de gène et de colère. Je ne voulais pas aller à ce bal, je l’avais dit à maman, répété à mes frères qui se moquaient de ma timidité.

    J’avais l’impression d’être mise en vente, ma robe affirmait que je venais pour danser, et je ne savais pas danser . Ma robe disait : « Invitez-moi » et je ne voulais pas être invitée.  J’avais honte de mon âge, je me sentais bien trop jeune, trop godiche et si j’avaisAnnées folles jazz2fan tournoyé un peu au mariage du cousin, c’était la plupart du temps avec des partenaires que je connaissais déjà, famille et amis. Mais aller au bal parmi des étrangers éveillait en moi un monde d’impressions sauvages et je ne rêvais que d’une chose : disparaître.

    Nous entrâmes. On nous conduisit à notre table réservée. Je regardais par terre. Je ne voulais voir personne. Et d’une poigne décidée j’empoignai la chaise qui tournait le dos à la salle. En face de moi, maman me fit les gros yeux.

    - Voyons, viens ici près de moi, laisse la place à ton frère…

    Mon frère dansait déjà…Lui n’avait aucun complexe, il était élégant, beau, charmeur. Puis maman sourit à quelqu’un derrière moi, j’entendis : « Vous permettez, Madame ? », je me retournai, un jeune homme s’inclinait vers moi...

    Maman, souriante, permit. J’étais debout, face à cet inconnu et lui lançai d’un air de défi : « Je ne sais pas danser… ».

   - Eh bien, dit-il, je vous apprendrai…

   Il m’apprit. Lui et d’autres, qui semblaient ne pas sentir mon pied maladroit écraser quelquefois le leur, habile et rythmé.  Nous bavardions. Enfin, eux parlaient, moi j’écoutais, je danse salonrougissais, ils disaient « Mais vous voyez que vous savez danser, mademoiselle ? » et la demoiselle constatait sans le dire que peu à peu, mais oui, elle suivait mieux le cavalier, cessait de vouloir aller à gauche quand il l’entraînait à droite, trouvait même la bonne façon de poser discrètement la main sur l’épaule virile et commençait à compter ses pas pour la valse.  Puis mon frère m’invita. Je cessai tout à fait de me raidir, je me laissai guider, avec lui tout allait vraiment bien. Quand il me ramena à notre mère, j’étais nettement plus sûre de moi.

   Quand l’orchestre entama la dernière danse, un de mes cavaliers s’approcha vivement et m’offrit un gros bouquet de roses. « Vous êtes si gentille », me dit-il.ydansecouple Il  s’appelait André.  Je lui dis mon prénom. Il me ramena à la table  familiale, dans le brouhaha des chaises qu’on recule, les vêtements qu’on va chercher au vestiaire. Il me sourit un peu tristement. Je ne le revis jamais.

 

LORRAINE

              

        -

 

Publicité
Publicité
Commentaires
L
Bonjour, cher Latil tu as raison, on "s'habillait pour sortir" et il y avait une joie (du moins pour les jeunes filles), à enfiler une robe qui donnait un peu de magie à l'instant. Souvent, je regarde les magazines féminins actuels et les modes absurdes lancées par des créateurs, qui transforment la femme en trapèze, font un pan devant à une jupe courte qui du coup est déséquilibrée, choisissent des mannequins anorexiques dont les bras maigres me font toujours penser à des malades en fin de vie. Quand je regarde des films des années 50, les actrices et les mannequins avaient des rondeurs aux bons endroits et elles étaient "belles". Qu'on ne vienne pas m'affirmer que les filles chétives aux visages anguleux d'aujourd'hui sont belles! C'est vers 68, en effet, que tout a basculé et s'il fallait certainement une révolution dans les interdits de l'époque, par contre l'excès a entraîné la drogue, la liberté de moeurs, le laisser-aller et le laisser-faire. Pour glisser doucement mais sûrement vers ces crimes de fous qui massacrent les foules grâce à des armes illégales et puissamment destructrices. Excuse-moi pour ce discours enflammé (!) mais tu vois, la mode m'a entraînée vers les excès de tous genres. Heureuse Année, cher Latil. Bisous pur la circonstance.
Répondre
L
Un souvenir merveilleusement conté, je reconnais là bien la journaliste. C était encore le temps ou l on s habillait pour sortir, peut étre un peu trop. Tout a commençé a changer dans les années 68, il y a eut tellement d histoires dans les bals(Chez nous cela s appelait les Kilbes).Déja dans les années 70 on sortait dans les boites qui étaient noires et enfumées.<br /> <br /> Bonne Soirée Lorraine<br /> <br /> Latil
Répondre
L
Chère Praline, le romantisme a mauvaise presse de nos jours! Pourtant, il éveillait des émotions qu'on n'oublie pas, la preuve!...<br /> <br /> Merci pour tes souhaits; ils sont d'autant bienvenus que j'ai une bronchite qui me condamne à la chambre! Mais j'aime assez être chez moi au moment des fêtes; j'ai vu toute ma famille à la Noël, je passerai Nouvel An avec mes livres; j'adore lire au lit!...<br /> <br /> Et pour toi, Chère Praline, je te souhaite une brassée de joies diverses, celles qui te feront le plus chaud au coeur, et qui te réjouiront aux heures plus tristes. Je t'embrasse affectueusement.
Répondre
L
Quand un souvenir passe, je tente de l'attraper dans mon filet à papillons...Pour le partager avec vous. Je me demande parfois si les jeunes filles d'aujourd'hui sont plus heureuses dans leur "relative" liberté, sous leurs airs émancipés, que celles de mon époque qui découvraient le monde à tout petits pas...
Répondre
P
Je t'imagine, si belle et si pure dans cette jolie tenue blanche ! je comprends que l'on t'ait offert des fleurs... Le romantisme n'est plus ce qu'il était... Je t'embrasse Lorraine, termine bien l'année, et bon démarrage de la suivante, avec mes voeux sincères et affectueux.
Répondre
Publicité