LA VIE PARISIENNE
Témoin de son temps, Jean Béraud le fut avec un brio et un talent incontestables! Grâce à lui, nous pénétrons dans la vie parisienne qu'il peignit avec un réalisme un peu moqueur, restituant l'ambiance des cafés de la Belle Epoque, croquant les rues de Paris et saisissant, le sourire aux lèvres (du moins je l'imagine!) les jolies femmes affairées qui y circulaient à pied ou en voiture. Il pénétra dans les salons feutrés de la bourgeoisie, peignit les petits métiers et fréquenta les hommes de lettres. Il fut notamment l'un des témoins de Marcel Proust lors de son duel à Meudon avec Jean Lorrain. (Wikipédia)
J'ai aimé suivre à la trace l'une ou l'autre de ses promeneuses, les escortant en pensée dans ce Paris effervescent que nous ne connaissons plus. Et j'ai choisi deux jeunes femmes pour illustrer l'art de ce peintre que j'aime beaucoup.
J'ignore si la cambrure de cette jeune femme l'amusa, s'il l'accentua quelque peu ou si cette malheureuse avait vraiment cette allure projetée vers l'avant, à la fois sans doute parce qu'elle se dépêche, mais aussi (mais surtout?..),par la grâce de cette tournure (appelée familièrement "faux-cul"). Les vêtements de dessous à cette époque voulaient sculpter la silhouette féminine, et la tournure allait s'y employer! On l'attachait sous le jupon en dessous de la taille, plus ou moins abondante selon le goût ou la discrétion de chacune! Jupes, draperies, volants, noeuds étaient ainsi soulevés vers l'arrière, dessinant un profil plus ou moins rebondi. Cet attirail connut le sommet de sa vogue vers les années 1880. Ajoutons-y le corset aux fines baleines enserrant au maximum la taille d'autant plus fine, et nous aurons un exemple charmant de ce que la Mode fait faire à la plus modérée des femmes.
Sa "Modiste sur les Champs Elysées", de condition plus modeste donc, est aussi affublée d'une tournure et lutte contre le vent qui emporte le chapeau d'un des promeneurs, plus loin. La vie parisienne était faite de promeneuses huppées et de travailleuses de la couture et du chapeau, lequel avait une importance bien perdue de nos jours.
La boîte à chapeaux avait une utilité quotidienne et se retrouvait dans les bagages vers les contrées les plus lointaines. Il achevait la toilette et donnait à celle qui le portait, la dignité, l'espièglerie, la coquetterie ou le charme. Et si le choisir avait de l'importance, si on lui consacrait le temps voulu et même davantage, l'art de le maintenir élégamment sur la tête en toutes circonstances signait, à n'en pas douter, un irréprochable maintien!
Jean Béraud a saisi les attitudes et les toilettes, l'environnement et la beauté féminine. On lui doit plus de deux cents portraits. J'ai aimé lui rendre vie le temps d'un billet, car il touche en moi je ne sais quel amusement intérieur et un certain atttendrissement devant cette époque qu'on disait "Belle" mais dont il ne reste que des souvenirs, des écrits, des tableaux...
LORRAINE