JEUNESSE
J’ai toujours un attendrissement quand je vois les petits écoliers entrer dans l’école. Je revois
aussitôt cet âge inquiet de la première ardoise, et plus tard le doux ennui des après-midi de mai alors que le soleil joue sur les branches des marronniers et qu’une morose récitation s’élève confusément de la classe.
En ai-je perdu des heures devant ce tableau noir à rêver éveillée, emportée, inconsciente et soudain humiliée par la voix qui me ramenait vers un livre de chimie !
Et pourtant, souvenirs d’école, que vous m’êtes doux ! J’aimais jusqu’à l’austérité de la Supérieure, son regard ironique sur nos fronts inclinés et la bonté un peu rude qu’elle eut pour nous toutes.
Quelquefois, je rencontrais des professeurs hors de leurs cours et si je les surprenais à rire ensemble, je ne les reconnaissais pas, car je ne soupçonnais pas alors qu’on puisse avoir le visage conventionnel d'une "Mademoiselle" et celui de l’intimité.
C’est pourquoi, rencontrant ces petits qui ignorent ce qu’ils seront demain, j’ai toujours une pensée émue pour l’école de mon enfance, qui fit, d’une certaine façon, ce que je suis.
LORRAINE