CACHE-CACHE...
Où sont passés les jours enfuis ? Dans quel pays, dans quelle immensité se cachent-ils, se terrent-ils, nous narguent-ils ? Où sont passés les jours enfuis ?
Les vôtres, les miens, tous ces jours qui cahotent sur les chemins, vont cahin-caha, ou partent en courant, en chantant, ivres de joie ? Il doit bien en rester quelque chose ? Plus qu’une ombre tout de même ? Non ? Les jours de jeunesse où on ne pensait qu’à avoir vingt ans, comme un fruit qu’on déguste ? Les jours d’études, si concentrés, si tendus vers un but parfois illusoire, les jours professionnels, où l’on apprend que vivre, c’est aussi accepter les autres, les comprendre ou...s’en détourner ! Ils doivent bien avoir une empreinte de nos amours, de nos angoisses, les jours enfuis ? Ils ont quelques rides, comme nous, quelques déceptions à notre image, beaucoup d’espoir, beaucoup de chagrins disséminés sur les années, ils ne peuvent pas s’être envolés en fumée ?
Pourtant, quand on se retourne, on ne les voit guère. On tente vainement de se rappeler le premier sourire qui nous a chavirés, on sait qu’il faisait beau, que c’était un dimanche, mais à quelle date, à quel moment précis ?
Ils sont engloutis, les jours, disparus à jamais, avec ceux de toute l’humanité. Ensevelis quelque part, effacés de nos mémoires et de nos cœurs, ils sont morts pour rien, puisqu’on n’en a pas le souvenir.
Aujourd’hui est un jour de plus. J’ai envie de lui demander : « Où vas-tu ? ». Sans doute va-t-il me répondre : « Nulle part »...
LORRAINE
Tableau de Fragonard