UN SOIR EN VILLE
Là-bas, le centre ville a sorti ses terrasses
Des klaxons énervés se disputent les places
La marchande de fleurs s’engouffre dans le bar
Le portier du “Bristol” a tout d’un malabar
Les taxis lentement longent la rue Marine
Tandis que les clients lorgnent dans les vitrines
Les filles presque nues dans leur string de satin
Aguichantes, blasées, jouant du popotin
Un long cri hoquetant se prolonge et chancelle
Quelquefois en tournant le coin d’une ruelle
Comme si la folie se terrait en ces lieux
Mais non. C’est seulement un ivrogne furieux
Il s’en va titubant et se parle à lui-même
Contre le monde entier il éructe et blasphème
Une femme effrayée referme ses rideaux
Il trébuche et s’endort contre le caniveau
La Grand’Place a vingt ans en ce soir de juillet
On danse, on se bouscule, on rit,on reconnaît
Un visage entrevu à la dernière fête
L’orchestre tintamare, les coeurs sont en goguette
On entre au “Roi d’Espagne” ou bien à l’”Opéra”
Où la bière est si fraîche. On boit ou on boira
La blonde, la trappiste, l’inestimable gueuze
Qui donne le teint rose et la gorge rugueuse!
Dans les rues endormies les maisons se sont tues
Un taxi rôde encore où s’engoufre, vêtue
Celle qui tout à l’heure attendait le client
La nuit s’est installée. Un chat file en courant.
LORRAINE