VISITE DE JEUNESSE
Un jour où il pleuvait doucement, j’ai été me promener dans un grand jardin inconnu. J’écoutais le bruit léger des gouttes sur les feuilles du saule et je m’assis un peu contre la vasque où deux poissons rouges s’étiraient entre les pierrailles. La pluie tombait sur mes bras nus, sur mes joues et mes cheveux. J’avais laissé mon parapluie encombrant sous le porche et je traversai une petite pelouse pour sentir sur mes pieds libres dans leurs sandales la douceur de l’herbe.
Quand je rentrai dans la maison, l’amie qui y habitait m’invita à en faire le tour. Nous allâmes d’abord au grenier, ne fallait-il pas avant tout voir les routes par où viennent les gens, et savoir si le vent qui entre dans la cheminée a emporté des odeurs d’arbres, de sages petites odeurs d’herbes endormies, ou de rampants parfums volés dans les sous-bois ? Le grenier livrait par la lucarne des routes bordées de peupliers et un horizon voilé de forêts où il ferait bon se promener si je demeurais ici.
Et quand j’ai quitté cette maison hospitalière, j’ai emporté enclose dans un livre, une toute petite fleur étonnée dont je ne connais pas le nom et qui frisait toute seule au bord du sentier, et sentait bon.
LORRAINE