REVOIR LES FEES...
Dimanche, dans les Ardennes, j’ai brusquement reconnu la prairie aux fées dont j’avais longuement, voici quelque quarante ans, raconté la légende d’après un vieux grimoire découvert au fin fond d’une ancienne librairie.
Je fis, à l’époque, un relevé (fantaisiste et incomplet) d’histoires attachées depuis des siècles aux pierres écroulées s’ouvrant sur un antre, au ruisseau surgi une nuit de lune, et aux fées si présentes dans les bocages ardennais aux environ de Bouillon, Aywailles, Hotton, Barvaux...
Revenue pour deux jours sur les lieux, le hasard m’a rendu soudain
le même soleil dansant, et des formes aériennes surgies en ce ballet que seuls les sortilèges peuvent susciter. Les pieds nus de Mélusine effleuraient à peine l’herbe penchée; et la robe bleue enfuie sous les branches n’était-ce pas celle de Clématite qu’un prince voulait épouser ou tuer?..Tuer si elle se refusait. Mais nul ne peut tuer les fées; Quarante ans plus tard, ne venais-je pas de revoir la fée Viviane, inchangée, transparente, fluide comme un rêve persan? Et ce chant bref si pur n’est-ce pas celui du flûteau magique entendu jadis, aussi limpide, aussi charmeur?
Des traces imperceptibles de petits pieds étoilaient la prairie. J’ai
imaginé le tourbillon dansant dans l’ultime soir d’été, Esterella et Morgane, la Reine Mab, la Princesse Aril?... ensuite, réunies comme un essaim, les fées s’envoleraient lepremier jour d’automne vers leur château ancestral. Elles y vivraient jusqu’au printemps, jouant de la harpe et recevant, quelquefois, un seigneur de jadis, ombre parmi les ombres.
Non, ne me demandez ni le lieu, ni le nom. J’ai fait serment de me taire...
Mais rien ne vous empêche de rêver...
LORRAINE
Et pour celles d'entre vous qui aiment les fées, je republie ce poème déjà paru en 2009 et qui me semble compléter mon petit texte. Voici donc:
LE BALLET DES FEES
Le clair de lune a mis son or sur le gazon
Un ineffable essaim descend dans la clairière
Le doux son d’un flûteau murmure sa chanson
Et des robes d’argent tournent dans la bruyère
Les fées dans la prairie s’en sont venues danser
Mélusine d’abord toute de mousseline
Un rubis sur le front, les cheveux emmêlés
Fluide et insaisissable en la nuit cristalline
La fée Titiana penchée sur le ruisseau
Se voit dans le halo d’une étoile filante
Qui éclaire un instant le joueur de pipeau
Agenouillé près d’elle, son amie, son amante
La ronde s'éhevèle en un clair tourbillon
De jupons, de rubans, de tuniques soyeuses
La Fée Bleue s’envolant ressemble au papillon
Et Lilas resplendit en sa blondeur radieuse
La Dame Blanche alors mène la sarabande
Par-dessus les étangs, les villes, les coteaux
Et les fées dans le soir regagnent Brocéliande
Sa magie éternelle et les tours du château.
LORRAINE