UN DIMANCHE A LA CAMPAGNE
(Une consigne qui ravive le beau temps d'autrefois. Un dimanche à la campagne, que rêver de mieux?)
XXX
Aller chez ma cousine Constance ce dimanche? Le beau temps m’y invite, deux pies se poursuivent sur le toit, éclats noirs et blancs qui volètent en un ballet de plumes. Pourquoi hésiter ?
J'irai donc, heureuse de revoir Constance, si belle, si douce, qui m’enseigna le goût de la lecture quand, petite fille, je furetais dans le grenier où s’étageaient les livres délaissés. Ma cousine Constance, adolescente , lisait beaucoup et gardait pour moi les romans qu’elle jugeait de mon âge. Elle m’offrit d’abord « Le petit Lord Fontleroy » qui me charma , puis toute la Comtesse de Ségur ; enfin nous débouchâmes sur la collection « Stella » pour jeunes filles et je dévorai avec passion des histoires d’amour à l’eau de rose . Je me souviens de « Dactylo », « L’homme du Désert », « Vacances », les œuvres de Magali, Delly, Max du Veuzit, d’ autres.
Chaque fois que je vais chez Constance, me reviennent en bouffées les dimanches d’autrefois. Assises sur un vieux canapé de soie incarnat éraflé d’anciennes griffures, nous lisions côte à côte, éclairées par la clarté changeante des vitraux rouges, bleus, jaunes, qui ornaient toutes les fenêtres de la villa, y compris celles de la tourelle abritant le grenier. Le temps passa, les affections s’embrument un peu, on les ravive par une visite, un coup de fil. Chacune suit sa route, mais Constance n’a pas quitté la villa Marguerite cabossée de souvenirs.
Un dimanche à la campagne ? J’arrive !..
LORRAINE
"Liseuse" tableau de Vladimir VOLEGOV