LE MONDE TOURNE SUR LUI-MÊME
Il tourne. Il est rond, le monde. Donc, quand j’ai la tête en bas, des inconnus sont debout sur leurs jambes, ailleurs, très loin.
Normalement, je devrais décoller , m’envoler dans les airs, flâner dans un ciel d’orage, muser avec la pluie, ou encore obéir au vent qui souffle et me pousse, me pousse. Comme des centaines de milliers de personnes qui, comme moi, occupent ce côté-ci de la terre.
On se heurterait gentiment, on s’excuserait : « Pardon, je ne l’ai pas fait exprès », on rirait bien, on ferait des rencontres imprévisibles, un juge et son condamné, ou un travesti sans son pagne. On continuerait notre promenade, attendant que le monde se remette du bon côté.
Et alors, hop,nous atterririons tous pour vaquer à nos occupations. L’un irait au bureau, l’autre reprendrait les commandes de sa locomotive, la jeune fille frétillante défilerait sur le podium en présentant la dernière mode, l’infirmière se saisirait de sa seringue, le malade reprendrait conscience, le politicien ses slogans, le journaliste ses faits divers, l’instituteur son enseignement et le cuisinier ses casseroles. Ces interludes nous permettraient des repos bienvenus ; un tapis volant m’entraînerait dans le sillage du maharadja, la petite Caroline qui ne parle à personne se retrouverait nez-à-nez avec l’intarissable commentateur de France 1 à qui elle se sentirait obligée de répondre ; le Prince Charles d’Angleterre tenterait en vain d’assujettir la couronne sur ses cheveux gris, elle lui échapperait toujours, allez savoir pourquoi ; et Barak Obama prendrait un peu de repos entre deux décisions irrévocables.
Oui, le monde tourne. Mais par je ne sais quel phénomène de gravité, nous restons où nous sommes et le laissons tourner...C’est dommage !
PASSANTE