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LE CAHIER DU SOIR de LORRAINE
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31 juillet 2012

LE BAL

         A 4 ans, j’ai été au bal. Un beau grand bal de grandes personnes où, en réalité, je n’étais pas indispensable ! Mais quand on a une fille de vingt ans qui pleure en cachette dans sa chambre parce qu’elle ne sort jamais, à cause de « ce petit chameau » (c’était moi !), que font les parents ? Ils se concertent, ils discutent, ils pèsent le pour et le contre et finalement admettent qu’en ce soir de réveillon ils chaperonneront leur aînée...et emmèneront la petite dernière !

         Car à cette époque, une jeune fille convenable ne fréquentait pas seule les lieux de plaisir. Etcharlestonmême si mes frères l’escortaient, n’auraient-ils pas trop d’indulgence devant des assiduités excessives ?..

         Ma sœur était belle, longue et mince, le teint clair poudré juste assez pour que je dise « Tu sens bon » en passant près d’elle. Elle haussait les épaules, vite excédée, me repoussait si je  voulais caresser le tissu de sa robe rose ou voir de plus près le diadème à la mode cette année-là. En fait, elle me l’avoua beaucoup, beaucoup plus tard, j’étais l’empêcheuse de danser, d’aller au théâtre, au cinéma, de sortir le samedi soir, de rencontrer l’amour, en somme ! Moi, bien sûr, je croyais seulement qu’elle avait un drôle de caractère et puis je n’y pensais plus.

         Mais ce soir du 31 décembre, elle rayonnait.

couple danse

A peine installée à la table réservée, un garçon s’inclina : « Vous permettez, Madame ? » et maman permit. Ma sœur s’envola. Dans mon fauteuil, je tournais le dos à la piste mais dans les grands miroirs qui tapissaient la salle et reflétaient les lustres illuminés, je suivais d’un œil attentif le défilé des cavaliers qui s’empressaient vers nous.

         - Regarde, maman, comme  il est laid , il a l’air d’un singe...

         En habit et plastron, gominé et cravaté, le galant n’entendit pas ce portrait à l’emporte-pièce et maman, un peu affolée, se leva vivement et m’installa sur la banquette près d’elle, sous bonne surveillance. Mon père fumait cigarette sur cigarette dans le hall où les messieurs mûrs parlaient entre eux.

         Mes frères changeaient de cavalière à chaque danse, et moi j’enregistrais pour toujours ces airs à la mode, les serpentins et les boules colorées lancées sur les danseurs, les musiciens sur l’estrade et le fantaisiste qui circulait entre les couples en chantant un refrain à sa manière qui déclenchait les éclats de rire.

         Elégant, sanglé dans son habit bleu nuit, les yeux clairs cernés d’un mascara noir, je crois bien qu’il fut le premier béguin de ma jeune vie !

         Nous rentrâmes à 4 H. du matin. Je dormais dans les bras de mon père. Ma sœur ôta ses chaussures argentées et sa robe de voile, enfila son kimono chinois et dormit jusqu’à 5 H. comme une jeune fille courtisée qui emporte, dans son petit sac de velours les mots qu’on lui a murmurés et les rêves qu’elle effilochera durant les prochains jours...

LORRAINE

 

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Commentaires
L
Tu as raison, même si cela me fait un peu froid dans le dos! je me dis qu'à 15 ans, même instruites pas la famille, la TV, internet, ces jeunes sont néanmoins fort démunies devant la séduction masculine, ou leur propre succès qui mont si vite à la tête! Et que l'amour, réduit à la sauvette et au petit "protecteur" de plastic, (quand il y en a!..) c'est triste!
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L
Féerique, certes, inquiétant je ne m'en souviens pas!je regardais de tous mes yeux ce monde inhabituel, ces toilettes, ces lumières, et aussi les personnes si diverses, et la musique et les danses! Sûrement mieux que ma soeur que les messieurs invitaient sans relâche! Je me souviens notamment d'un jeune officier très assidu...
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P
Mince alors, mon commentaire d'hier soir n'est pas passé... je crois que canalblog déraillait ;) Je disais que de nos jours, la plupart des jeunes filles connaissent toutes les discothèques de leur région, où elles vont, non accompagnées, et bien avant l'âge de 15 ans ! Bises chaleureuses chère amie.
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M
Un premier bal,il me semble que ce devait être féerique et inquiétant à la fois. Et le rôle de petite soeur pas toujours facile à tenir. Mais c'est celui-là qui permet de retenir les anecdotes, la grande soeur courtisée devait avoir la tête qui tourne. Merci d'être passée sur mon blog.
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L
Quand je fus à mon tour une jeune fille, ce fut comme toi, j'allai au bal avec maman et mon frère aîné. Jamais seule non plus! Puis je rencontrai mon mari et comme il ne dansait pas...
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