UNE LETTRE...
En rangeant mon « tiroir aux souvenirs » où s’empilent depuis si longtemps les papiers qui me sont chers, j’ai soudain entre les mains une lettre que j’écrivis à mon mari voici plus de quarante ans. Une lettre de « bonnes résolutions », comme il s’en écrivait quelquefois au moment des vœux. La mode en est tout à fait passée et c’est peut-être dommage. Elle permettait un retour sur soi-même et, dans la lucidité, un choix de vie. La voici.
« Une année vient de commencer dont nous ne savons rien, ni toi toujours sceptique , ni moi toujours confiante. . Et , cette fois encore, je me promets que la vie sera ce que nous en ferons.
Car je crois aux efforts qui suivent les efforts, aux humbles matins sans grandeur où l’on s’oblige à vivre sans béquilles, aux petites joies et aux grands espoirs. Donne-moi la main ! Même quand tu t’enfonces dans tes insondables silences et que ton visage devient pour moi la vitre fermée contre laquelle mon regard bute, ne nous éloignons pas. J’ai besoin de ta force comme tu as besoin de mon rire et j’accepte que tu sois tour à tour secret ou détendu, comme tu m’acceptes imprévisible et pourtant présente.
N’est-ce pas, nous laisserons là cette année encore les colères qui me font flamboyer et les flèches que tu décoches en artiste. Ou si d’aventure l’envie nous vient de nous opposer, dressés l’un contre l’autre comme des ennemis, qu’un peu d’esprit vienne au plus lucide afin qu’il prenne cette main qu’on ne lui refusera pas.
Vivre est difficile, surtout pour ceux qui rejettent la fadeur, la monotonie, le laisser-faire et le laisser-dire. Chaque matin neuf a sa noblesse, son courage à défendre, sa lutte à mener, sa victoire. Si tu es là, tout est possible. Janvier commence aujourd’hui. Moi, je suis prête.
Donne-moi la main… »
LORRAINE